« Il n’importe pas qu’un être soit croyant ou non :
il est plus important qu’il soit bon. » (Dalaï-Lama)
J’ai vu cette citation sur Facebook, le jour même où j’ai reçu d’un bon ami un dossier sur différentes techniques de méditation, chacune ayant comme but le mieux-être de celui ou celle qui la pratique. C’est presque gênant de l’avouer, mais ma réaction initiale a été du genre Vipassana est bien meilleur que toutes ces niaiseries. 😕
Heureusement, dans un moment de lucidité, j’ai réalisé la portée de ce que je venais de dire. J’étais tombé dans le piège du « Moi, je sais! », fasciné, hypnotisé par la technique elle-même, oubliant la raison pour laquelle je la pratiquais. Mon ego avait pris le dessus, en plein à l’opposé de l’objectif de cette forme de méditation, qui est justement de nous défaire de cette emprise sclérosante de l’ego, du « moi », obstacle principal à toute transformation intérieure.
Vipassana est arrivée à temps dans ma vie, car sa pratique a été pour moi un solide coup de 2 par 4 entre les deux yeux : je voulais que ma vie s’améliore, mais pas question de changer quoi que ce soit chez moi.
Avant de commencer la pratique de Vipassana, j’avais lu que chacun de nous est le résultat de sa propre histoire, la somme de toutes ses actions passées.
« Si tu craches en l’air, ça risque de te retomber sur le nez », comme se plaisait à dire ma grand-mère. Malgré ces sages paroles, je continuais stupidement de « cracher en l’air », tout surpris lorsque ça me retombait sur le nez.
Petit détour vers la théorie du chaos. Dans cette théorie des systèmes complexes — et c’est ce que nous sommes, des systèmes complexes —, on parle de l’effet papillon (le battement d’ailes d’un papillon au Brésil qui peut provoquer une tornade au Texas). Un tout petit événement peut produire un résultat, qui devient cause d’un autre résultat, et qui, de fil en aiguille, contribue à un résultat très important quelques jours, quelques semaines ou même quelques années plus tard. Si aujourd’hui, je suis contrarié par une hausse du prix de l’essence, par exemple, ou par les paroles de quelqu’un, il est parfaitement possible qu’une des causes soit d’avoir été mécontent, la fois que ma mère a donné à ma sœur plus de patates chips qu’à moi. Ou d’avoir mal réagi lorsqu’une fille avait souri à mon copain et pas à moi. Qui sait? Il y en a peut-être des milliers, de causes.
Au fil des ans, sans que je m’en rendre compte, ces insignifiantes réactions se sont répétées, ont pris de la force, pour finalement évoluer en une habitude de vie. J’ai ainsi développé l’habitude de me plaindre, et tout devint susceptible d’être un sujet de plainte. C’était tellement courant de me plaindre ou de me sentir contrarié que je ne m’en rendais même plus compte. Un réflexe, en quelque sorte.
C’est bien beau « il est plus important qu’il soit bon », comme le recommande le Dalaï Lama; mais comment y arriver? Et ça veut dire quoi, « être bon »?
Une partie de Vipassana est un entrainement à la conscience attentive, et c’est ce qui me permet de me regarder agir, honnêtement, sans tricher. Voir mon propre conditionnement en action. C’est-à-dire, prendre conscience que je rouspète, au moment même où je le fais. Prendre conscience que j’ai une réaction de jalousie ou d’envie, au moment même où ça se produit.
À force de regarder attentivement comment ça se passe en dedans, j’ai fini par comprendre que la paix et le bonheur que, comme tous les humains, je cherche tant doivent passer par la transformation de mon propre esprit. En observant calmement, intensément et avec détachement le fonctionnement de mon propre esprit, je réalise que lorsque je suis malheureux, inquiet, envieux ou amer, l’origine est dans la tête, et que mon état d’esprit n’a rien à voir avec les circonstances de ma vie. Je suis de plus en plus convaincu que c’est en changeant mon état d’esprit que je peux changer ma vie.
Vipassana est un outil pratique pour aider à me détacher en profondeur de ma manière de penser, et, par conséquent, changer ma manière de vivre. J’ai d’ailleurs pu en voir les bienfaits dès les premières semaines qui suivirent le premier cours.
En développant la faculté d’attention, j’arrive à mieux contrôler mon esprit et ainsi éviter toute action qui risque de produire des résultats malsains, tout de suite ou plus tard. Je surveille un peu mieux mes paroles, par exemple, dans le but d’éviter d’offenser ou d’attrister quelqu’un. Grâce aux séances de méditation quotidienne et à la qualité d’attention que je tente de maintenir, il y a une lumière rouge qui s’allume lorsque je sens monter de l’agressivité.
Ce qui est remarquable, c’est que cette lumière rouge est physique. Je SENS qu’il y a quelque chose de désagréable qui se passe. La colère ou la jalousie se manifestent dans le corps AVANT MÊME que je prenne conscience que je suis en colère ou jaloux. Il est alors beaucoup plus facile d’y mettre fin avant que ça dégénère.
Et les araignées dans tout ça? Si je n’ai pas été trop confus dans mon propos, le lecteur aura bien compris que je veux me libérer de toute malveillance, agressivité ou haine, peu importe l’objet. Qu’elle soit dirigée vers moi, vers une autre personne ou vers un animal, une négativité demeure une négativité. La haine reste la haine.
Et c’est payant, car j’en suis le premier bénéficiaire : lorsqu’il y a de la colère ou de la haine, je me sens mal. Lorsque la colère ou la haine sont absentes, je me sens bien. En paix.
Dans le prochain article, je tenterai d’expliquer comment j’ai découvert que je générais — encore là sans m’en rendre compte — autant de négativité et de haine, et comment Vipassana m’a aidé à ne pas m’en faire et à m’en défaire.
Bonjour Pierre
Quand je lis un de tes articles, je réalise que tu sais faire profiter à tous ceux qui te lisent des talents d’écriture que tu as su sagement faire fructifier. La lecture est facile et donne beaucoup à réfléchir. L’expérience et la sagesse qui s’en dégagent et m’inspirent, m’aideront tout au long des jours à devenir meilleur.
Merci Pierre pour ton excellent travail.
R. Hade
Merci, René. J’adore parler du Dhamma ainsi que des bienfaits que j’en retire. Alors quand je reçois un commentaire comme le tien, c’est un petit bonus.
Bravo monsieur Pierre
Vos écrits m’ont fait réfléchir à mon prochain séjour au Centre Vipassana qui s’en vient à grand pas; j’ai tellement hâte d’approfondir encore plus mes réflexions… Continuez à m’alimenter de vos commentaires 🙂
Merci de votre commentaire, Josée. C’est toujours une joie pour moi aussi d’aller faire ma retraite annuelle. J’en tire tellement de bienfaits. Bon séjour!